Leader mondial sur le marché des essais, de l'inspection et de la certification, Bureau Veritas existe depuis 180 ans et emploie 80.000 personnes dans 160 pays. Sa mission est d'aider ses 400.000 clients à gérer les risques liés à la qualité, la sécurité, la santé et la responsabilité sociale.
Client historique de SENAR, Bureau Veritas est particulièrement aguerri à l'utilisation de la Réalité Augmentée sur mobile, avec plus de 2.000 stagiaires formés via nos simulateurs. Nous avons recueilli le retour d'expérience de Guillaume Laurent, Directeur Métier Formation France.
D'où vient l'intérêt de Bureau Veritas pour l'AR mobile ?
L'innovation fait partie de l'ADN de Bureau Veritas. Que ce soit au niveau des inspections, des certifications ou des formations, cela fait 180 ans qu'on innove. Pour ne citer que deux exemples récents, nous avons mis en place des contrôles par drone et des inspections connectées avec des lunettes de type Google Glass. C'est donc tout naturellement que nous nous sommes penchés sur les technologies immersives et leurs bénéfices potentiels pour nos clients. Nous y avons vu le moyen d'améliorer encore la formation des équipes aux procédures de sécurité. Et nous avons vite compris que l'AR mobile était la technologie qui allait cocher toutes les cases de notre cahier des charges.
Quelles étaient ces "cases à cocher" ?
Notre cahier des charges était assez simple : nous voulions une solution qui apporte un véritable intérêt pédagogique en permettant d'augmenter la pratique. Elle devait être ludique, pour faciliter son adoption, et ergonomique. Mais surtout, scalable : un formateur devait pouvoir la mettre en œuvre très facilement, sans que les apprenants aient besoin d’apprendre à l'utiliser avant de démarrer leur formation.
C'est là que les choses ont coincé avec la technologie concurrente de la réalité augmentée, la réalité virtuelle. La prise en main d'une appli VR n'a rien d'immédiat. Vous devez commencer par former chaque formateur, puis chaque stagiaire, à l'utilisation du casque. Il faut aussi prévoir 2 à 3 fois plus de formateurs à chaque session. Certains utilisateurs sont réfractaires au casque VR ou ne le supportent pas bien (problème avec le port de lunettes, nausées, maux de tête…). Il aurait été beaucoup trop complexe pour nous de déployer le projet sur une flotte de casques VR, sans parler de la différence substantielle de coût.
Notre choix s'est donc très vite arrêté sur l'AR mobile et une flotte d'iPad, qui avaient le mérite de lever tous ces freins.
Comment a démarré votre expérience avec l'AR mobile ?
Nous avons commencé par la tester sur nos formations à l'habilitation électrique. En France, le code du travail impose à tout employeur de former et habiliter le personnel évoluant à proximité d'installations électriques. Le sujet se prête particulièrement bien à l'AR et la demande était là : nos stagiaires comme nos formateurs nous réclamaient depuis longtemps des formations avec plus de pratique et moins de théorie. Une réponse simple consistait à se dire : "OK, installons des platines et des armoires pédagogiques partout." Mais c'était compliqué à mettre en œuvre, et très coûteux en hommes et en matériel.
Après avoir tranché en faveur de l'AR mobile, nous avons fait un POC avec SENAR, début 2019. Puis nous sommes passés en mode Lab pour développer les scénarios d'exercices. La mise en production a eu lieu en septembre 2019, sur un premier centre de formation. Nous avons ensuite étendu l'expérience à 12 de nos centres. Aujourd’hui, nous avons déployé sur l'ensemble de la France.
A quoi ressemble concrètement un simulateur AR ?
Il comprend généralement une liste de plusieurs scénarios. Le déroulé de chacun d'eux colle de très près à une procédure à appliquer dans la vie réelle, tout en étant très "gamifié".
Lorsque l'apprenant lance un exercice, il prend tout d'abord connaissance de son ordre de mission. C'est très concret ; par exemple, réaliser la consignation d'une installation électrique pour pouvoir changer les lames d'un malaxeur industriel. Il commence par s'équiper en choisissant ses EPI, son matériel et son balisage sur une étagère virtuelle. Selon le niveau de difficulté, on lui indiquera - ou pas - le nombre d'équipements à récupérer.
L'apprenant va ensuite vérifier ses équipements. Là, toujours au sein du simulateur, on peut s'assurer de son niveau de compréhension à l'aide de systèmes plus classiques : réponse à un QCM, diffusion d'une vidéo montrant un geste technique précis. Puis l'apprenant est invité à réaliser l'une après l'autre toutes les tâches de la procédure, sur une armoire électrique virtuelle et interactive.
Avant d'ouvrir cette dernière, il voit le tapis isolant se dérouler au sol, et le balisage qu'il a choisi se met en place. A l'ouverture, il entend le vrai son de la porte. Comme dans une véritable armoire électrique, il doit consulter le schéma de câblage qui lui permet d'identifier les composants sur lesquels il est amené à agir. Tout est identique dans le moindre détail à l'armoire physique sur laquelle il sera par la suite amené à passer son évaluation.
Qu'en est-il de la reproduction d'accidents, souvent évoquée comme l'un des points forts de l'AR ?
C'est en effet un point clé ! Dans le simulateur que nous utilisons lors de nos formations préparatoires à l'habilitation électrique, une étape clé consiste à identifier la zone de travail et à réaliser l'analyse de risques. Si cette analyse est mal faite, l'apprenant est laissé libre de continuer la procédure. Mais un peu plus loin dans le déroulé du scénario, un accident va soudain se produire, comme un arc flash, ou l'attaque d'un essaim de guêpes niché dans l'armoire. Le fait que l'accident arrive par surprise - exactement comme dans la vraie vie - est le meilleur moyen de marquer les esprits et de rendre l’apprenant plus vigilant lors de ses futures analyses de risques. Il va ainsi progresser grâce à ses erreurs.
L'énorme avantage de travailler avec SENAR, c'est qu'ils ont recréé nos propres accidents, basés sur le solide vécu de nos équipes sur le terrain. Le nid de guêpes, par exemple, n'est pas un risque auquel les stagiaires vont forcément penser, et pourtant ça arrive ! L'intérieur d'une armoire électrique, c'est chaud et sombre ; les insectes adorent ça…
Quel est pour vous le principal avantage de la formation en AR mobile ?
L'avantage clé des simulateurs AR, c'est de pouvoir pratiquer et répéter les exercices à l'infini. Nous souhaitions, bien sûr, que nos scénarios soient répétés, car on sait qu'un cerveau adulte mémorise beaucoup mieux en pratiquant et en répétant. Mais en se prenant vraiment au jeu les apprenants sont allés au-delà de nos espérances. La gamification et le système de points présentent cet énorme avantage de les inciter à refaire un scénario même s'ils l'ont globalement réussi au premier essai. Ils se font un défi personnel de remporter plus de points… notamment pour faire mieux que le collègue d'à-côté !
La conséquence directe c'est que des gestes clés en termes de sécurité, comme l'analyse de risques, sont répétés à de multiples reprises. C'est une chose qui nous a vraiment frappés : à leur premier essai, certains stagiaires vont bâcler leur analyse de risques en 5 secondes. Un accident va donc les prendre par surprise. A leur 2ème essai, l'analyse de risques va durer 25 secondes. Au 3ème essai, on a vu des apprenants faire trois fois le tour de l'armoire, et même se coucher par terre pour être bien sûr de ne louper aucune anomalie !
Quel autre avantage le l'AR mobile vous a le plus séduit ?
Certainement le fait que l'AR dynamise nos formations. Déjà, comme on vient de l'évoquer, pendant une formation en AR, l'émulation de groupe joue à fond. C'est motivant pour chacun. Mais aussi, dans le cas de l'habilitation électrique par exemple, un formateur ne peut pas superviser plus de 2 ou 3 stagiaires lors de la pratique réelle, notamment pour des raisons de sécurité. Aujourd'hui, au lieu de passer une partie de leur temps de formation à lire des documents ou à compléter des QCM, les autres stagiaires s'exercent sur le simulateur AR. Du coup, ils sont déjà super entraînés quand ils retrouvent la véritable armoire électrique en pratique réelle.
Le retour des formateurs est également très positif. Ils se sentent libérés du scénario souvent un peu "enfermant" de leur Powerpoint. Moins de discours, plus d'action !
Vous avez aussi mentionné un avantage sur le plan écologique…
Oui, c'est un bonus plutôt sympa : utiliser un simulateur AR, c'est aussi bon pour l'environnement. L'impact sur notre empreinte carbone n'est pas neutre en termes d'installation de matériel et de déplacements.
Lors d'une formation à la sécurité incendie, on peut pratiquer l'exercice à l'infini sans utiliser de consommables comme le gaz du bac à feu ou les recharges d'extincteurs pédagogiques. En AR, il n'y a ni gaspillage, ni déchets à jeter.
Comment réagissent les stagiaires à ce nouveau mode de formation ?
A ce jour, ils sont plus de 2.000 à avoir utilisé nos simulateurs AR durant une session de formation. Nous bénéficions donc d'un certain recul, et de pas mal de retours de nos apprenants. La première chose qu'ils adorent, c'est le fait de voir un objet virtuel dans leur environnement réel et quotidien. C'est sûrement plus simple et moins anxiogène pour eux que ne le serait un casque VR.
Au niveau des sensations, ils retrouvent environ 80% de leurs sensations réelles. Ce qui n'existe pas encore, ce sont les sensations de pression, de serrage, ou de température. Ils citent le fait de sentir le poids d'un tournevis dans sa main, ou la résistance d'une vis… Ça, c'est très compliqué à reproduire en AR. En dehors de ce type d'aspects, ils jugent l'expérience très réaliste. L'effet d'immersion créé par les sons est aussi un point qu'ils mentionnent assez souvent, car il contribue pleinement à l'expérience.
Nos stagiaires et nos formateurs apprécient aussi d'avoir plusieurs scénarios à jouer. Certains apprenants nous ont déclaré se former sur le risque électrique depuis de très nombreuses années* et n'avoir jamais eu l'occasion de pratiquer autant, sur des scénarios aussi variés.
* Note : l’INRS préconise que l'habilitation électrique d'un salarié soit renouvelée tous les 2 ans, chaque renouvellement donnant lieu à une formation de recyclage.
Quelques chiffres
Note : Ces évaluations sont basées sur une enquête menée auprès de 205 stagiaires entre le 6 septembre et le 20 octobre 2022.
L' AR mobile est-elle suffisamment immersive pour de la formation professionnelle ?
Sans aucun doute. On arrive à un niveau de réalisme vraiment bluffant. Quand les stagiaires réalisent une vérification d'absence de tension sur le simulateur AR que nous utilisons pour les formations préparatoires à l'habilitation électrique, entre les animations répondant à leur interactions, le bruit du testeur et celui des pointes de touche entrant dans les borniers, on les voit concentrés et pleinement immergés dans l'expérience.
Dans le simulateur de sécurité incendie, on retrouve la fumée, les particules qui volent, les bruits de craquements… On peut même se brûler (virtuellement) si l'on approche trop près. Le son strident de l'alarme ajoute au stress du stagiaire, le projetant avec encore plus de réalisme dans une situation d'urgence. Chaque détail peut être observé de près ; par exemple, les restes calcinés d'une poubelle dans laquelle on peut identifier les déchets à l'origine du départ de feu. Et puis, si l'utilisateur tarde à réagir, le feu s'étend au-delà de la poubelle. C'est particulièrement frappant d'expérimenter les conséquences de ses actions… ou de son inaction. Surtout quand on voit les flammes commencer à envahir la salle de formation !
Un autre avantage de l'AR, c'est que seul l’équipement utile au scénario est représenté ; on ne distrait pas l'attention des apprenants avec un environnement virtuel dans lequel certains feraient la chasse aux erreurs en comparant la couleur des pots de fleurs !
Qu'en est-il de la formation en AR, en termes d'obligations réglementaires et de code du travail ?
Pour la sécurité incendie, le code du travail demande que chaque salarié soit formé à l'utilisation d'un extincteur et à la reconnaissance du signal d'alarme. Evidemment l'AR, ce n'est pas une mise en pratique réelle, mais c'est un très bon complément. On est à cheval entre la partie théorique et la partie pratique de l'exercice.
Quelle vision les formateurs ont-ils sur ce que font leurs stagiaires en AR ?
Le formateur a accès à une console de reporting en ligne qui fait partie intégrante de la plateforme SENAR. Il y voit les résultats, les réussites et les erreurs de chaque stagiaire, à chaque étape d'un scénario. Il peut par exemple se rendre compte que plusieurs stagiaires "trébuchent" au même endroit et immédiatement rectifier le tir en ré-expliquant un point qui aurait été mal compris. Dans une salle de travaux pratiques, aussi grande soit-elle, il est très compliqué de contrôler 10 apprenants sur 10 installations pédagogiques différentes - quand elles existent… Avec l'AR, on arrive très bien à le faire.
En combien de temps vos formateurs ont-ils été formés à la plateforme SENAR ?
Nos formateurs intervenant en habilitation électrique ont été formés en une demi-journée. Nous leur avons présenté le séquencement pédagogique et la plateforme SENAR (application mobile, console de reporting) pendant un peu plus d'une heure. Ils ont ensuite passé 2 heures à répéter les exercices en AR, sur iPad. La prise en main est donc très rapide.
Comment les formations AR de Bureau Veritas sont-elles dispensées ?
Aujourd'hui l'AR mobile est une brique pédagogique que les formateurs intègrent à leur déroulé lors de nos sessions de formation classiques.
Et comme elle offre cette souplesse d'être très facilement "scalable", nous avons aussi commencé à l’utiliser lors de classes virtuelles. Il suffit que l’apprenant ait une tablette ou un smartphone compatible avec la réalité augmentée, ce qui est le cas de +80% des mobiles de moins de 5 ans. Il n'y a même pas besoin d'une très bonne connexion, car Internet n'est nécessaire que le temps de télécharger l'application et le simulateur, ce qui ne prend qu'une ou deux minutes. Une fois le simulateur installé sur le mobile, la connexion internet n'est pas nécessaire pour jouer - oups, lapsus ! - pour pratiquer. Et le stagiaire peut continuer à s'entraîner après la formation s'il le souhaite.
Même en présentiel, plusieurs apprenants ont souhaité utiliser SENAR sur leur smartphone au lieu d'utiliser les iPad mis à leur disposition dans nos centres. Ces stagiaires préféraient rester "en terrain connu" et ne pas avoir à intégrer l'utilisation d'un iPad. C’est d‘ailleurs la solution que nous préconisons aujourd’hui, pour rendre encore plus facile l'adoption de l’AR. Finalement, nous apprenons aussi de nos apprenants !
Quelles sont vos formations qui intègrent de l'AR mobile ?
Nous utilisons les simulateurs SENAR pendant nos formations sur l'habilitation électrique et sur la sécurité incendie. Nous avons aussi déployé des simulateurs sur le contrôle des harnais ou des élingues lors de "Safety Days" chez nos clients, et nous allons prochainement les intégrer à nos formations catalogue.
Les simulateurs sur les premiers secours vont également bientôt trouver leur place lors de nos formations, pour nos clients souhaitant une alternative à la formation “Sauveteur Secouriste du Travail”.
Enfin, nous intégrons des simulateurs “sur mesure” pour répondre aux besoins spécifiques de certains clients, notamment pour des procédures de consignation /déconsignation (LO-TO).